Décidé à inclure au moins une course de 50 milles dans ma préparation du VT100, il m’a semblé que le Pineland 50 milles était judicieusement placé dans le temps soit deux mois avant. De plus cet endroit est à 20 minutes de Freeport que je connais bien pour y être passé souvent pour profiter du «Outlet» de Patagonia… La course s’annonçait pour le moins humide avec des prévisions météo pessimistes et une semaine précédente très pluvieuse. Déjà en allant chercher nos dossards le samedi, ça avait mauvaise augure. Les courses courtes distances du samedi matin avaient laissé un site détrempé et aux allures d’après-tornade avec des tentes mi-tendues et pleins de trucs renversés ou abandonnés.

Notez que toutes les photos de ce blogue sauf la dernière sont une gracieuseté de Pineland Trail running Festival qui rendait téléchargeables gratuitement les photos des courses du weekend.

La course «canicross» du samedi!

La course «canicross» du samedi!

Je n’aime pas la routine alors il m’arrive parfois de changer des recettes qui marchent pour les remplacer par, appelons ça, des essais… Axé sur ma préparation d’une course de 100 milles, j’ai, une fois de plus, fait des bêtises. Mais après tout que serait un blogue sans anecdote? 😉

Mauvais choix des chaussures

J’utilise une panoplie presque gênante de chaussures de course. Je n’ai pas besoin d’une calculatrice pour en faire le décompte mais ça me parait possible d’ajouter cette pathologie au DSM-6. Mes chaussures les plus «weird» sont, sans aucun doute, mes Hoka Mafate, le modèle «trail» de cette marque. Mon ami Dan Chartier les avaient gentiment nommées les «Gene Simmons running shoes». Très appréciées des ultramarathoniens, ces chaussures ultra-absorbantes (comme les Pampers) permettent dans une certaine mesure d’allonger les distances. Je n’entrerai pas dans un débat minimalisto-radicalista-patati-patata alors je me contenterai de dire que pour une paire de jambes d’un coureur X, des chaussures plus épaisses absorbent plus de chocs. On devraient tous être d’accord là-dessus! Ceux qui ne sont pas d’accord, j’vous donnerai une ride de mountain bike assis sur mon guidon 😉

J’avais donc décidé il y a longtemps d’utiliser mes Hoka pour la totalité du Pineland 50 milles afin de m’assurer du confort de ces chaussures pour de très longues distances. Le but étant de les utiliser pour la deuxième moitié du VT100. Pas trop nerveux de nature, j’ai conservé ce choix malgré les conditions météo et surtout l’état des sentiers : erreur de débutant! Je n’avais jamais utilisé ces chaussures dans des sentiers mouillés et cette fois on ne parlais pas de «un peu humide», on parlait de sentiers totalement boueux.

Bouette running...

Bouette running…

Le résultat a été catastrophique. Luc Hamel dirait plutôt «drôle à chier à terre»… C’est simple à expliquer : en plus d’être épaisssses, les semelles des Hoka sont larges alors combinées à un poids-plume comme moi dans ces conditions ça donne de l’aqua-planage extrême. Dans certaines sections je tenais difficilement debout et pour la moitié du parcours je sollicitais tous les muscles stabilisateurs de mon corps. Au lieu de mettre le pied dans la boue et de «pogner le fond», je flottait mais comme un randonneur en raquettes de babiche sur un lac gelé…en pente!!! Après la petite boucle de 5k et la première loop de 25k j’avais réussi malgré tout à m’en sortir pas trop mal en 3h15 mais la fatigue se pointait le nez. Parti de conditions difficiles pour ce qui est de la boue, ça n’a fait que tendre vers le misérable avec l’ajout dans ce «blender de marde» des coureurs du 50km puis ceux du 25km.

Je devais ressembler au gars de droite...dans les descentes c'était terrible!

Je devais ressembler au gars de droite…dans les descentes c’était terrible!

Mauvais choix alimentaires

Depuis maintenant plus de 6 mois que je ne mange plus de viande. Parfois des crevettes au resto quand y a rien d’autre au menu que des animaux morts. Dans un soucis de m’alimenter sainement je m’étais dis que pour ce 50 milles je mangerais ce qu’il y aurait sur les tables des ravitaillements plutôt que mes habituels jujubes énergétiques qui m’ont toujours bien servi en courses. Jusque là ça aurait pu aller car les choix étaient variés. Mais ma totale absence de jugement induit par je ne sait trop quoi sinon mes efforts constants de simplement rester debout m’ont fait choisir des trucs ne contenant à peu près pas de glucides. Boudant les patates pleines de glucides j’ai opté pour les peanuts. C’est bon des peanuts salées mais visiblement c’est insuffisant pour courir 50 milles! J’ai vidé la tank et quand je m’en suis rendu compte c’était trop tard.

Pourtant ce n'était pas le choix qui manquait...

Pourtant ce n’était pas le choix qui manquait…

Le résultat a été assez éprouvant. Un «shut-down» des muscles de tout le corps et non seulement des jambes. Pour la première fois de ma vie je réalisait que des avants-bras ça a un certain poids! Les biceps scrap, je n’arrivait plus à garder mes bras fléchis pour courir. Comme si on m’avait fait tenir un truc lourd pendant des heures… J’ai expérimenté quelques techniques pour arriver à avancer. Les bras le long du corps en marchant c’était bien mais en courant ça n’allait pas. Découragé j’ai même essayé les bras croisés et c’était aussi nul en plus d’avoir l’air d’un comédien de «Vol au dessus d’un nid de coucou». J’ai finalement opté pour coincer mes pouces sous mes bretelles de camelback. Pas optimal pour courir vite mais ça faisait déjà un bout que l’option de courir vite était morte et enterrée. C’est ainsi que j’ai terminé péniblement la deuxième boucle du parcours, résolu à avoir mon premier DNF.

Mauvaise décision

J’avais décidé d’abandonner depuis longtemps ainsi lorsque j’ai avisé les officiels que je quittais après 55km, je croyais apaiser mes muscles et mes nerfs. Me voir assis à une table de picnic, piteux, la tête dans les mains alors que le band folk me garochait des notes par la tête m’a subitement semblé bien plus difficile que de me relever pour faire les 25km restants. J’étais en retard sur mes pires scénarios mais encore bien en avance sur les « cut-off »…et capable de marcher. Ramper s’il le faut mais j’avoue qu’avec toute cette bouette, ça m’aurait moins tenté. Après une quinzaine de minutes d’arrêt je suis retourné voir le directeur de course et à ma demande, les officiels m’ont permis de reprendre ma «death march». D’un pas moins lourd qu’à la fin de la deuxième boucle, je suis reparti en comptant à rebours chaque long kilomètre. 24-23-22-21-20…jusqu’à 10 où je suis repassé près du finish et où m’attendais ma blonde Marie-Pier. De son côté elle avait bien terminé sa course de 50km et avait eu tout son temps pour se doucher et bouffer…Malgré ses 50k dans les jambes et en bottes à tuyaux elle avancait plus vite que moi! Ses encouragements étaient bienvenue et les 10k restants étant moins bouetteux, je commençais à voir la lumière au bout du tunnel brun.

Marie-Pier pendant son 50km

Marie-Pier pendant son 50km

J’ai appris dimanche que je peux être fier et heureux de passer le fil d’arrivée même si ça arrive deux heures plus tard que prévu. Les finishers de cette course reçoivent une « cloche à vache » plutôt qu’une médaille. Je l’utilisera pour vous encourager quand j’en aurai l’occasion!

L'histoire ne dit pas s'il a fait exprès pour plonger au finish

L’histoire ne dit pas s’il a fait exprès pour plonger au finish

Accompagnant son père sur la ligne d'arrivée, le sentier lui «a mangé» ses bottes l'une après l'autre!

Accompagnant son père sur la ligne d’arrivée, le sentier lui «a mangé» ses bottes l’une après l’autre!

Durant cette course j’ai pensé à Pat qui m’avait écrit récemment qu’il pensait se mettre à la pêche alors qu’il était ralenti par une blessure récurente. C’était pas longtemps avant le Massanuten 100 qu’il a couru bien d’aplomb. J’ai aussi pensé que les courses longues distances c’était fini pour moi. J’ai dit à Marie-Pier que je pensais annuler mon départ au VT100. Ce à quoi elle m’a dit, bien sagement, de ne pas décider ça dimanche…

Passant le finish après un DNF!

Passant le finish après un DNF!

Deux jours plus tard j’ai non seulement oublié la douleur et décidé de ne pas annuler le VT100 mais j’ai aussi ajouter un autre 50milles à mon calendrier. Dans un peu plus de 2 semaines, je tenterai de faire mieux au TARC50. Il s’agit d’une course de nuit et je crois bien utiliser ma lampe habituelle…

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